vendredi 4 janvier 2019

Semaine 12. Les êtres sensibles, les individus, les personnes?

Que faire pour protéger les esprits des autres espèces?

5 commentaires:

  1. Rowlands 2016 :

    Rowlands dissocie l’auto-conscience (self-awareness) réflexive de l’auto-conscience pré-réflexive. Pour illustrer l’existence de cette dernière, il utilise notamment les affordances de Gibson (perception-action) pour montrer que la perception implique une notion d’auto-conscience implicite de son corps et de ses buts. Selon l’auteur, l’auto-conscience pré-réflexive et l’unité de la vie mentale sont les caractéristiques d’une personne métaphysique.

    Selon ce que j’ai compris du texte, la métacognition (higher-order thoughts) n’est pas en mesure (et n’est pas nécessaire) d’unifier la vie mentale d’un organisme (unifier toutes les expériences comme appartenant ensembles, et à soi). Plutôt, l’unité de la vie mentale ferait partie intégrante du ressenti : « Whenever a subject has experiences, it recognizes, pre-reflectively, that these experiences belong to it – because this is part of what it is to have conscious experience ». Selon Rowlands, le ressenti est IEM, soit immunisé aux erreurs d’identification. C-à-d qu’en ressentant des expériences, il est implicite que ces expériences nous appartiennent (plutôt qu’à d’autres organismes) : "To have a sensation, thought, experience, or emotion is to be aware that this state is mine. My awareness of my mental states is, in this sense, IEM." Autrement dit, l’unité de la vie mentale est assurée par la nature du ressenti.

    Donc, les animaux non-humains dotés du ressenti ne seraient peut-être pas les objets directs de leurs propres pensées de façon explicite ou réflexive (reflexive self-awareness), mais auraient une vie mentale unifiée et une auto-conscience implicite, ce qui pourrait être décrit comme une certaine perspective sur le monde (« experiencing as »). En foi de quoi, on peut leur attribuer le statut de personne. À quoi cela sert-il ? Dans un article subséquent, Consciousness and the unity of mind, Rowlands responds :  « […] if a creature’s mental life is unified, it can be harmed in ways that something without a unified mental life cannot ». Des exemples de ces façons de causer du tort à ces créatures ayant une vie mentale unifiée seraient la mort ou encore l’ennui. Cela signifie que le statut de personne s’accompagne d’un devoir moral de la part des êtres humains.

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    1. Si « l’auto-conscience pré-réflexive » n’est pas ressentie, elle n’est aucune sorte de conscience. Si elle est ressentie, alors il s’agit du ressenti tout court. (Les robots insensibles peuvent profiter des affordances gibsoniennes dans leurs mouvements.)

      Oui, tout ressenti est ressenti, donc ça implique un « ressenteur ». Mais l’instant suffit. Pas nécessaire d’avoir une « intégration » à travers le temps. Juste un seul ouch, ressenti… Bref, le problème métaphysique de l’identité de la « même personne » à travers le temps n’est pas pertinent. (Et le même problème métaphysique est présent pour les robots insensibles, ainsi que pour les pierres, à travers le temps.)

      Est-ce qu’un « ressenteur » ponctuel ou intermittent peut être une personne juridique? Qui sait? Mais en ce qui concerne la souffrance, c’est de la causer que la loi doit interdire, et non juste au cas où elle est chronique.

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  2. Afin de permettre aux animaux d’être considérés comme des personnes morales, Rowlands redéfinit la notion de conscience de soi (car l’absence de cette propriété les exclurait de la définition de personne morale, d’après lui). Efficacement, il montre l’homoncularité du concept de conscience de soi et définit une pré-conscience de soi à laquelle participerait beaucoup d’animaux. Son texte est intéressant car il vient détruire des arguments philosophiques qui rejetaient d’emblée les animaux comme des êtres ayant des droits. Toutefois, il ne précise pas quels droits cette nouvelle définition confèrerait à certains animaux et quels sont les animaux qui remplissent les nouveaux critères. En fait, le fait que les animaux soient des êtres qui ressentent semble être le premier critère qu’il faille évaluer s’il faut parler de leurs droits d’être protégés.

    Ces textes sur la moralité et sur les droits des animaux soulèvent des questions dans la perspective du cours:
    Les frontières de la lutte politique ne semblent pas être celles de la connaissance. La lutte politique se confronte à des industries qui font souffrir des animaux qui sont mangés ou qui sont utilisés en recherche et qui sont très clairement des organismes qui ressentent. L’avancée de la connaissance semble toucher la recherche sur l’anesthésie chez les différents êtres vivants : elle soulève des questions sur la possibilité (beaucoup moins probable) d’une forme de ressenti chez certaines plantes tout en offrant la possibilité d’une compréhension réelle des mécanismes du ressenti. Les objectifs politiques de la lutte politique ne doivent pas nuire aux objectifs scientifiques de la connaissance, et vice-versa.

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    1. Le ressenti est nécessaire pour qu’un être ait des droits (de ne pas souffrir). Mais il est suffisant aussi.

      On laissera la question du ressenti des plantes à la réflexion des humains, puis qu’on n’a pas de choix que de les faire souffrir, si elles ressentent, pour que nous survivions. Mais c’est sûr que ça ne tombe pas sous le principe de la précaution, vue non seulement l’absence de choix, mais aussi la faiblesse des preuves.

      -- Contrairement au cas des vertébrés et la vaste majorité des invertébrés...

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  3. Lise
    Rowland décline son opinion en trois sphères :
    l’acte intentionnel lui-même (en l’occurrence, l’acte de penser)
    l’objet intentionnel de cet acte (l’homme dont le pantalon est en feu)
    le mode de présentation de cet objet (cet homme, moi, etc.).

    Dans ce texte, le principal sujet est le ressenti pouvant être nommé de deux manières :
    Il peut s’agir de quelque chose de corporel: un corps, une partie de celui-ci, ou un événement survenant dans ce corps, et ainsi de suite.
    Ou bien, cela pourrait être quelque chose de mental: un état mental (de premier ordre). Quel que soit cet objet, la conscience de soi consiste en un acte intentionnel dirigé vers lui.
    L'objet de l’incompréhension de se reconnaître dans le miroir peut être expliqué par les deux déficits qui sont les suivants:
    l'échec de la plupart des animaux soumis au test de reconnaissance de soi dans le miroir (MSR)
    l'absence de méta-cognition chez la plupart ou tous les animaux.

    Pour réussir le test, les animaux doivent reconnaître le corps dans le miroir comme son propre corps. C'est-à-dire qu'il faut penser à la forme: «C'est moi!» - où le démonstratif «ceci» désigne le reflet dans le miroir. Ainsi, l'acte intentionnel (de reconnaissance) est dirigé vers un objet (le corps qui apparaît dans le miroir) et cet objet qui est englobé sous un certain mode de présentation (identique à moi). Il s’agit d’un cas de prise de ressenti. Selon Rowland,la MSR est donc un test pour (une forme de) conscience de soi réfléchi.
    D’après moi, le fait de se reconnaître dans le miroir ne définit pas si l’espèce à un ressenti mais plutôt de quelle sorte d’intelligence il s’agit.D’autant plus que le ressenti implique un ressenteur et seul le ressenteur peut ressentir sa douleur qui est propre à lui.

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Été 2019 : Le problème des autres esprits des autres espèces (mardis & jeudis 9h30-12h30 PK-3605

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