vendredi 4 janvier 2019

Semaine 10. Au dessous de la mélée: les myxomycètes et les plantes


Et les êtres vivants n’ayant pas de systéme nerveux? Où est-ce que ça s’arrête?

8 commentaires:

  1. Lise-
    De ce que j’ai compris du texte de Vallverdu c’est qu’il essaye d’identifier la nature des processus cognitifs de base,avec une approche biocomputative qui permet d’expliquer de manière réaliste les subtilités de la communication.
    Il utilise notamment la moisissure visqueuse dans le cadre biologique par l’identification de la biocomputations de base qui rendent possible la connaissance et ouvrent la voie à l'émergence de la conscience.La moisissure acellulaire du P. polycephalum a également un cycle de vie sophistiqué qui inclut les corps fruitiers, les spores, les myxamoebae unicellulaires et la modium, un syncytium multinucléé.
    Le comportement du Physarum est régi par des milliers d’oscillateurs biochimiques, qui règlent des horloges locales et contrôlent l’activité statique et croissance par propagation d'ondes de polymérisation de l'actine.
    Cependant,les recherches sur les moisissures visqueuses ont permis de réaliser que le matériel du canal ionique et du neurotransmetteur sont à la base du logiciel de la cognition dans le cerveau et évolue de façon progressifs.

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    1. Les moisissures visqueuses sont un exemple révélateur de l’évolution des êtres vivants multicellulaires à partir des êtres unicellulaires sous l’influence des gradients chimiques. Ainsi, les interactions intracellulaires devienne aussi des interaction intercellulaire, ce qui devient éventuellement les interactions neuronales. Tout ça reste le mécanisme des capacités béhaviorales — d’action, d’apprentissage, etc. (« Problème facile ») On peut décrire et expliquer ce qui se passe informatiquement, computationnellement. Avec ça, on a expliqué le mécanisme sous-jacent à l’action. Mais où y entre le ressenti? Comment? Et pourquoi? À quoi ça sert? Qu’est-ce qui rendrait les moisissures visqueuses autre que des bio-robots, ayant le ressenti. (Si elles ressentaient. Est-ce qu’elle ressentent?)

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  2. Gagliano 2017:

    Dans cet article, Gagliano discute d’une étude précédente qui a tenté de démontrer que l’apprentissage associatif est possible chez une espèce de plante (pisum sativum). Selon cet article, les plantes montrent un effet d’apprentissage, car ils tendent à pousser vers une direction indiquée par un stimulus conditionnel (CS ; un ventilateur). Plus précisément, 69% des jeunes pousses ont grandi vers le CS, ce qui excède le seuil de la chance (50%).

    Les auteurs prétendent que l’apprentissage associatif justifie l’étude de la cognition et de l’esprit végétal (ressenti) : « By revealing that plants, too, are capable of associative learning and consequently, qualify as proper subjects of cognitive research these findings invite us to earnestly think about the question of the vegetal mind. » Ou encore « […] the ability to have experiences and feelings, rather than mere sensations, can be explored as a facet of the ability to learn through the formation of associations. »

    D’abord, les évidences de la capacité d’apprentissage associatif chez les plantes sont assez faibles. D’autres études devront être conduites afin de répliquer les résultats et d’écarter les hypothèses alternatives. Ensuite, même si les observations de Gagliano peuvent témoigner d’un apprentissage, il est certain que le mécanisme d’apprentissage n’est pas le même que chez les animaux (pas de SNC), ce qui rend dangereuse la généralisation aux plantes de la corrélation d’apprentissage associatif et de ressenti chez les animaux. Finalement, pourquoi proposer que l’apprentissage associatif suggère un ressenti ?

    Pour conclure, les auteurs rapportent que le fait que certaines plantes n’aient pas démontré d’apprentissage associatif ne signifie pas qu’elles n’ont pas appris. Ils proposent que les plantes qui n’ont pas réagi au CS on « choisit » de pousser dans l’autre direction, car ils considèrent que la suivie du CS n’est pas un pari certain. On pourrait penser que les auteurs avaient une hypothèse a priori et tentent de la justifier au-delà de ce qui est observable : « The expression of the conditioned response (CR) in our study is certainly a good indicator of learning, but the absence of the CR in some experimental groups does not necessarily indicate that learning did not occur. Keeping in mind that in a conditioning experiment, what an individual does is not the same of what it knows, is it possible that those seedlings asked to perform outside the daylight hours, chose to opt out of performing the conditioned light-foraging behavior. Because the consequences of performing the CR at a time that is misaligned with the internal circadian signals are uncertain (but likely to be energetically costly), is it possible that the plants opted for what they perceived as (but in actuality, was not) a “sure bet”—namely, their innate positive tropism to light—as a solution to the uncertainty problem? ». Considérant le manque de preuves à l’effet que les plantes sont capables d’apprendre, qu’une habileté d’apprendre par association n’est pas garante d’un ressenti, et qu’un certain biais peut être identifié chez les auteurs, cet article ne permet pas de conclure que les plantes ont un ressenti.

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    1. Bonnes critiques, David; tu as mis le doigt sur tous les points faibles de cette approche. Si avec les poissons les sceptiques tranchaient contre les évidences positives, avec les plantes les croyants tranchent contre les interpretations beaucoup plus plausibles que le ressenti.

      Mais que dis-tu pour les poulpes (Semaine 9, que tu as sautée)?

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  3. L’article de Vallverdu et al. tente plus de parler de cognition que de ressenti. En effet, il cherche à établir un substrat biologique minimal de cognition en étudiant les amibes et n’évoque le ressenti ni dans son abstract ni dans son introduction. En ce qui concerne notre but qui est de tracer les limites du ressenti chez les êtres vivants, c’est plus loin dans l’article que les auteurs établissent plus clairement leurs prémisses. Ils auraient mieux fait de commencer en affirmant leurs hypothèses en fonction du ressenti et en le séparant dès lors de la cognition. En utilisant les faits qu’ils relatent en ce qui concerne le ressenti, leur opinion pourrait être présentée comme suit:

    - Ils semblent vouloir émettre l’hypothèse affirmant que l’intégration d’information ressentie est à la base même de la vie, et ce, donc, même chez l’organisme unicellulaire.

    À titre d’évidence de cette hypothèse ils mentionnent, entre autres, que:

    1. Certaines structures du cytosquelette des cellules neuronales sont associées à l’anesthésie (la disparition momentanée du ressenti) chez l’être humain d’après des études qu’ils citent.

    2. Ces mêmes structures seraient associées à l’intégration d’information chez les organismes unicellulaires que sont les amibes, d’après un ensemble d’exemples qu’ils donnent.

    C’est une vision qui est loin d’être sans failles mais qui peut être explorée en nécessitant plus de preuves.

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    1. Il est vrai qu'une des actions des anesthésiants est de supprimer la sensation, et ainsi aussi le ressenti. Mais en supprimant le ressenti, elles suppriment aussi l'activité -- le mouvement, et les activités internes, comme l'activité neuronale (problème facile). (Il y a aussi des agents chimiques qui suppriment le mouvement sans supprimer le ressenti.) Au fond, le problème difficile est un problème concernant le lien causal entre le ressenti et l'activité externe et interne...

      Un des co-auteurs (FB) est le grand partisan du ressenti chez les plantes.

      Tu as raison que l'article, et la partie computationnelle concerne surtout la cognition -- la capacité à agir -- tandis que la partie sur le ressenti invoque les propriétés des anesthésiants...

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  4. Dans sa présentation à l’école d’été 2018 de l’Institut des sciences cognitives de l’UQAM, Baluska témoigne des capacités impressionnantes des plantes. Celles-ci présentent plusieurs comportements d’exploration de leur environnement, notamment lorsque les racines explorent l’ensemble d’un environnement cylindrique plutôt que de « bouger » en ligne droite vers le haut du cylindre. Baluska présente plusieurs autres études où il est question des capacités de prise de décision et de communication des plantes et de leur réponse face au stress.

    De ce que j’en comprends, la position de Baluska quant à l’étude des capacités cognitives des plantes (voire même de leur ressenti?) repose sur 4 principaux arguments :
    1/ La méthode scientifique prône l’étude de systèmes simples, puis de systèmes croissants en complexité. Toutefois, ce n’est pas le cas pour les « sciences de la vie », qui ont débuté l’étude de la vie chez l’humain et qui n’incluent que depuis peu l’étude de la vie chez les autres espèces, qui possèdent des systèmes généralement moins complexes (j’imagine que par le mot « vie », Baluska parle du « ressenti » ?). Cela fait en sorte que chaque tentative d’interprétation des comportements ou des capacités cognitives des autres espèces mène à de l’anthropomorphisme. Selon Baluska, il s’agit plutôt d’anthropocentrisme.

    2/ Tous les êtres sensibles ont un fonctionnement biologique par régulation électrique (bioélectricité) (Galvani), y compris les plantes. De plus, un des principaux neurotransmetteurs chez tous les animaux (incluant l’humain), le GABA, est également présent chez les plantes et agit comme neurotransmetteur. En étudiant l’électrophysiologie des plantes, il est possible d’observer une activité électrique oscillatoire (Bose, 1926; Calvo, 2017) et synchronisée (Masi, 2009) produite par le sommet des racines, qui constitue une zone de transition (Root Appex Transition Zone).

    3/ Une condition sine qua non de la présence de la vie chez les espèces est leur réponse à l’anesthésie, qui se traduit généralement par l’absence de comportement. Chez les plantes, cette absence de comportements est aussi observée suite à un anesthésiant (éther diéthylique). Le lien entre l’anesthésie et le ressenti semble être abordé par plusieurs auteurs (notamment Vallverdu, 2017), mais comme l’a mentionné Étienne dans son commentaire, le problème difficile demeure : « Quel est le lien causal entre l’anesthésie (ou l’activité interne/externe) et le ressenti? ».

    4/ Enfin, Baluska semble adhérer à la « Root-brain theory » de Darwin, qui stipule brièvement que le cerveau des plantes se trouve dans le sol (racines). Ainsi, les plantes peuvent se déplacer, mais à une vitesse beaucoup moins grande que les animaux.

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    1. Bon résumé, Audrey. Oui, la croissance ressemble au mouvement et pourrait peut-être être interprétée comme un mouvement très lent. Mais à quoi sert le ressenti pour guider le mouvement extrêmement lent? (« à quoi ça sert? » est une occurrence particulière du problème difficile, auquel nos réponses sont circulaires et non explicatives). Mais même la réponse homonculaire est bloquée dans le cas de ce «mouvement» ultra-lent: L’explication homonculaire de la douleur aiguë serait que c’est un signal urgent qui nous soustrait vite d’un dommage et qui nous aide à éviter le dommage dans l’avenir et pendant sa convalescence. Mais le ressenti de la croissance (chez les plantes ou dans nos propres corps) serait plutôt comme la douleur chronique, qui ne semble avoir aucune fonction, et de n’être qu’un effet secondaire et pathologique d’autre chose.

      Oui, Baluska semble identifier la vie avec le ressenti, un mariage entre le vitalisme et l’animisme…

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Été 2019 : Le problème des autres esprits des autres espèces (mardis & jeudis 9h30-12h30 PK-3605

Été 2019 : Le problème des autres esprits des autres espèces Heure  : mardis et jeudis 9h30 - 12h30 (30 avril - 18 juin) Lieu  : PK-3605...