vendredi 4 janvier 2019

Semaine 1. Introduction à l’esprit

 On commence par s’interroger sur ce que c’est que la conscience? la sensibilité? la cognition? le «problème  corps/esprit» et le «problème des autres esprits»? Et le problème de l’incertitude (Descartes) en science? C’est quoi le Test de Turing et est-ce la solution au problème des autres esprits ?
Suppléments langue française (vidéos) :
Le test de Turing expliqué en moins de 3 minutes     Le modèle Turing    Le jeu d’imitation

9 commentaires:

  1. Qu’est-ce que le problème facile des sciences cognitives (DOING) ? Expliquer comment (causalité) et pourquoi (valeur adaptative) les organismes vivants sont capables de faire tout ce qu’ils sont capables de faire.

    Ce problème est dit facile puisqu’il sera possible de le résoudre après plusieurs prix Nobel ou un nouveau Newton. Nous savons qu’il peut être résolu grâce à la méthodologie imaginée par Turing : créons un modèle qui puisse faire tout ce que nous pouvons faire et ce de façon indistinguable à la nôtre (rétro-ingénierie de la cognition humaine) ; peu importe la causalité derrière ce modèle, elle est une explication de tout ce que nous pouvons faire. Cette méthodologie s’appelle Test de Turing.

    Pour ce qui est d’expliquer pourquoi nous sommes capables de faire tout ce que nous pouvons faire, il en revient d’évaluer si ce que nous faisons nous permet de faire la bonne chose avec la bonne sorte de chose, c’est-à-dire de catégoriser. Pour être adapté (fit), il faut que notre doing nous permette de bien catégoriser (de bien faire les bonnes avec les bonnes sortes de choses).


    Qu’est-ce que le problème difficile des sciences cognitives (FEELING) ? Il s’agit d’expliquer a) comment (causalité) et b) pourquoi (valeur adaptative) les organismes vivants ont la capacité de ressentir.

    a) Trouver l’explication causale, trouver ce qui génère notre ressenti est difficile, voire impossible, car Turing a proposé que lorsque nous aurons atteint une rétro-ingénierie complète de la cognition humaine, il ne restera plus d’espace causal pour expliquer le ressenti. Toute tentative d’expliquer causalement la cognition à partir de ce qu’on ressent ne peut aboutir qu’à l’équivalent des confabulations de patients anosognosiques. Autrement dit : nous avons l’anosognosie de la causalité derrière notre capacité à faire tout ce que nous pouvons faire (par exemple,expliquer comment on a pu nommer son professeur de troisième année).

    Il s’agit d’un problème épistémologique et non pas ontologique : j’ai la certitude que mon ressenti existe (sentio ergo sentitur). Admettre un doute ontologique sur mon propre ressenti revient à admettre que je fus un zombie philosophie, soit une entité pourvu de tout le doing des humains sans le feeling.


    b) Il est difficile d’expliquer la valeur adaptative (le pourquoi) du ressenti puisque le feeling ne joue aucun rôle causal dans le doing. Ce constat implique que le ressenti soit fonctionnellement inutile : on peut expliquer l’entièreté du doing sans le feeling. L’évolution étant paresseuse, il n’y a aucune raison qu’elle ait conservée un trait inutile. Le défi (impossible) est donc de trouver la valeur adaptative du ressenti et personne n’a encore fait la moindre progression pour répondre à cette question.


    Initialement, je souhaitais faire un lien entre le manque d’espace causal pour résoudre le problème difficile selon Turing et le théorème d’incomplétude de Gödel mais je dois m’avouer vaincu : il ne s’agit effectivement que d’une autre forme de weasel word (donc une perte de temps).

    Cependant, je m’entête à mentionner que ce théorème n’implique pas uniquement des jeux de paradoxes verbaux inconséquents : le théorème démontre aussi qu’il n’est pas possible de prouver tout ce qui est vrai en mathématique (une distance entre la preuve et la vérité). Si l’on s’amuse à généraliser cette notion dans le cas des sciences cognitives¸ l’idée qu’il n’ait pas d’espace causal à partir des axiomes du doing pour expliquer et prouver le feeling ne contredit pas que le feeling soit une vérité.

    Vidéo sur le théorème de Gödel : https://www.youtube.com/watch?v=O4ndIDcDSGc

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    1. Merci Nicolas, mais, pour rassurer ceux qui sont inscrits au cours:

      Les détails que tu donnes sont beaucoup plus élaborés que ce qui est nécessaire et pertinent à ce cours!

      Ce qui est important ici c'est juste de comprendre que la méthodologie de Turing ne peut expliquer que ce que les animaux font ( « problème facile » ). Elle ne pas expliquer pourquoi les animaux ressentent ( « problème difficile » ).

      Le problème des autres esprits est encore autre chose: c’est le problème de constater quels animaux ressentent, et qu’est-ce qu’ils ressentent.

      C’est ça ce qu’on va traiter dans ce cours

      Le théorème de Gödel n’est pas pertinent et ne fera qu’effrayer les pauvres étudiants inscrits au cours!

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    2. Je ne crois pas que le ressenti soit nécessaire, ou apporte quelque avantage que ce soit d’un point de vue évolutif. En théorie, un être humain et un humain zombie (si cela peut exister) devraient posséder la même valeur adaptative. L’évolution ne sélectionne que les traits qui présentent une valeur adaptative face à une pression sélective, mais ces pressions ne peuvent toucher le ressenti si on accepte qu’il soit fonctionnellement inutile (il n’offre pas de meilleure fitness). À mon avis, c’est plus probable alors que le ressenti humain soit un sous-produit (ou un effet secondaire), des conditions neurologiques/cérébrales requises pour constituer la cognition humaine, c’est-à-dire un réseau intégré de systèmes cognitifs, qui eux sont sélectionnés par l’environnement. Suivant ce raisonnement, comme « Étienne » propose, il serait donc impossible de créer un système passant parfaitement le test de Turing, sans qu’il soit pourvu de ressenti : je pense que pour rétro-« ingénieurer » un système intégré capable de fournir un output indiscernable de l’output humain, 100% du temps, il faudra par le fait même donner à ce système(à l’instar de l’évolution, soit de façon « accidentelle ») les caractéristiques d’un système doté d’un ressenti humain.

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    3. David, on n'accepte pas que le ressenti est fonctionnellement inutile comme prémisse! C'est une conclusion provisoire, grâce au fait que le ressenti n'est pas observable, ni à l'expérimentateur, ni au rétro-ingénieur Turing (problème facile), ni à l'évolution « l'horlogier aveugle ».

      Qu'est-ce que ça serait d'être un « effet secondaire » aussi vaste et dramatique que ça?

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  2. Au fond, la thèse de Church-Turing vient répondre au problème de décidabilité qui suit : existe-t-il un algorithme décidant de la validité de chaque système logique oui ou non ?

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    1. Merci à toi aussi, Axelle. Mais encore une fois, c'est un autre cours, ça! La thèse de Church-Turing ne rentre point dans ce cours, qui concerne le problème des autres esprits: Comment peut-on constater qu'une espèce animale ressent, et qu'est-ce qu'elle ressent? Et pourquoi (et à qui) est-ce que cette question est importante.

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  3. 1/ Je me questionne d’abord sur l’utilisation du mot « intelligence » dans le titre de l’article de Turing. Il n’y réfère que très peu (voire pas) dans sa démonstration, si ce n’est qu’à la fin de l’article lorsqu’il aborde l’apprentissage. Considère-t-il que la pensée et l’intelligence sont la même chose? Sinon, pourquoi utiliser ce terme?

    2/ Je me demande si le fait de réussir le jeu de l’imitation permet de conclure que les machines pensent (ou ressentent). Est-ce que le fait d’imiter le comportement humain nous renseigne sur la possibilité qu’une machine pense? Est-ce que ça n’illustre pas simplement la capacité d’une machine à effectuer un comportement « humain »? Enfin, est-ce qu’il est possible de mesurer la pensée? Est-ce que l’empirisme est le meilleur moyen d’y arriver?

    3/ Je trouve curieux le choix du mode d’expression de la machine, qui reflète à mon avis une forme de communication neurotypique. Prenons l’exemple d’un humain qui n’utilise pas le langage et qui n’est donc pas capable de communiquer oralement ou par écrit, peu importe la langue (p. ex. : un trouble neurodéveloppemental ou suite à un AVC). Si cet humain jouait au jeu de l’imitation avec les règles et paramètres établis par Turing, il est possible de croire qu’il ne pourrait pas gagner. Est-ce que cet humain ne pense pas pour autant?

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    1. 1. Par « l'intelligence » Turing veut dire ce que nous appèlerions la « cognition » aujourd'hui : la capacité des organismes à faire tout ce qu'ils sont capables de faire. (Le test de Turing indique si la cognition est est présente. Les tests de QI ne mesurent que son degré.)

      2. « L'imitation » était un mauvais choix de terme. Turing parle de la génération de la capacité en question, pas de son imitation. Selon toi, qu'est la cognition au delà des pouvoirs d'action qu'elle génère? (Question difficile.)

      3. La finalité du TT est d'expliquer le mécanisme causal qui génère la cognition (humaine) en créant une entité qui est capable de faire tout ce qu'un humain est capable de faire, le long d'une vie, à tel point qu'on ne peut pas distinguer le candidat d'un autre humain. Parler et comprendre font une grande partie de la capacité cognitive humaine. Un humain qui ne peut ni parler ne comprendre la parole est toujours humain, et il cognise (par exemple un enfant, ou un patient aphasique), mais en modélisant ça nous sacrifions notre plus puissante outil de télépathie. Ça serait encore plus facile de modéliser un humain paralysé et dans un coma, mais ça ne nous dirait pas grande chose concernant le mécanisme nos capacités d'action...

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  4. Lise
    Semaine 1 -Turing – Et le problème de l’incertitude (Descartes) en science?
    C’est quoi le Test de Turing et
    est-ce la solution au problème des autres esprits ?


    Alan Turing créé en 1950 le Jeu d’imitation qui fut appelé par la suite le test de Turing.Ce dernier est fondé sur l’hypothèse que les humains peuvent juger l’intelligence d’une machine en comparant son comportement avec le comportement humain.Cependant,Turing n’a jamais voulu que son jeu d’imitation soit utilisé pour mesurer l’intelligence d’une intelligence artificielle.D’autant plus que bons nombres d’humains ont échoué au test de Turing- Est-ce-que cela fait d’eux une intelligence artificiel ? C’est pour cela qu’on ne peut prôner qu’une seule et unique vérité.

    En somme,Turing a réussi à créer un outil de méthodologie qui permet d’évaluer la fiabilité du modèle utilisé .

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